Etats-Unis d’Amérique, XXIe siècle
Après des siècles de lutte contre l’esclavagisme, des décennies de combat face à une politique prônant la ségrégation raciale, les Afro-américains continuent d’affronter le fléau des discriminations qui heurtent encore aujourd’hui leur place légitime au sein du pays.
De nos jours, l’exemple le plus frappant est la violence policière envers les Noirs américains. Loin d’être le seul mais de manière plus subtile, on retrouve aussi des statues commémorant les différents acteurs blancs de l’époque de l’esclavage et de la ségrégation raciale. Perçus comme des héros par ceux qui louent leur place dans l’histoire, ils sont pour d’autres, un rappel pesant et quotidien de la condition des Noirs aux Etats-Unis durant des centaines d’années. De ce fait, de nombreuses voix s’élèvent contre ces symboles d’une Amérique divisée. Et ce combat fondé sur la couleur des concitoyens habitants perdure.
Un combat que nous, la diaspora africaine, partageons tant par l’esprit que sur le terrain.
Europe, XXe siècle
Outre-Atlantique, l’histoire n’est pas semblable. Nulle envie de comparer l’incomparable histoire des Afro-américains à celle des peuples africains meurtris par le colonialisme. Mais, certaines similitudes sont tout de même perceptibles.
Les bourreaux ont eu la même envie de laisser en héritage à l’histoire, leurs compatriotes ayant joué un rôle important dans la servitude des noirs. La méthode n’est pas importante mais il est nécessaire que ce soit visible et durable. Les écrits, les monuments ou les statues en leur honneur en attestent.
Plusieurs pays européens avaient décidé de se partager le continent africain. La France, la Belgique et le Royaume-Uni, pour ne citer qu’eux, avaient chacun leur ”petit jardin” africain. Ils se sont appropriés ces territoires au détriment des populations locales. La colonisation avait pour but d’asservir le peuple Noir tant mentalement que physiquement. Les intentions bien que présentées comme légitimes n’étaient en rien saintes. Des propagandes religieuses aux châtiments corporels, tous les moyens étaient bons pour imposer leur vision de la société à des peuples considérés sans civilisation.
Encore aujourd’hui, nous retrouvons à travers l’Europe, des statues glorifiant des personnages clés de la colonisation en Afrique. Cecil Rhodes en Angleterre, Léopold II & Baron Lambermont en Belgique ou encore le Général Leclerc en France sont des exemples de ces glorieux z(h)éros statufiés.
Cependant, il n’est pas sans savoir qu’à l’heure où s’écrivent ces lignes, l’Afrique n’est officiellement plus sous le joug de l’Occident. La deuxième moitié du XXe siècle a vu les pays africains obtenir leur indépendance et à fortiori le départ des colons. La décolonisation est le fait d’hommes et de femmes qui ont décidé de se rebeller et de se battre contre un régime d’oppression. Kwame Nkrumah au Ghana, Thomas Sankara au Burkina Faso ou encore Patrice Lumumba en République Démocratique du Congo (RDC) sont trois exemples parmi des milliers d’autres. Trois hommes engagés dans une lutte pour le panafricanisme.
Belgique, Juin 2018
Venons-en à l’histoire de la Belgique qu’on omet de nous conter à l’école.
Suite à la conférence de Berlin, le « grand » roi Léopold II de Belgique prend possession du Congo. Après plus d’un demi-siècle d’une politique autoritaire et mortuaire, le peuple congolais commence à s’ériger contre l’administration coloniale belge et se fait de plus en plus entendre.
La voix du peuple sera représentée par Monsieur Patrice Emery Lumumba, mort pour sa vision d’un nouvel idéal pour les Congolais et l’Afrique dans son ensemble. Aujourd’hui, l’histoire nous permet de ressusciter cet homme souvent oublié de nos manuels scolaires.
Né en 1925 en RDC, le jeune Lumumba suivra une formation scolaire dans l’enseignement catholique tenu par les missionnaires belges durant la période coloniale. Le niveau étant insuffisant pour l’esprit du jeune étudiant, il s’instruira de manière autodidacte. Il lui a fallu plusieurs postes au sein de l’administration publique pour comprendre l’importance internationale qu’à le Congo de part ses ressources naturelles. Dès lors, il va œuvrer pour l’indépendance graduelle de son pays. Entouré de partisans de ses idées d’un Congo pour les Congolais et par les Congolais, il tiendra tête au gouvernement belge en place.
Parallèlement à son combat contre l’establishment belge, il mènera sur un autre front une bataille pour l’unité nationale des Congolais au-delà de leur différence d’ethnicité.
Le 30 Juin 1960, le Congo obtiendra enfin son indépendance de la Belgique. Ce jour- là, Patrice Lumumba, en sa qualité de Premier Ministre, prononcera un discours qui résonnera dans tous les esprits mais qui sonnera aussi le début de la fin pour lui.
Perçu comme un affront par les Belges, il n’aura pas le temps de façonner sa vision. Six mois après l’indépendance, il sera assassiné par son ‘’fidèle’’ bras droit, le futur ‘’président’’ Joseph-Désiré Mobutu. Mobutu qui prouve par cette action que la décolonisation mentale est plus lente que celle du territoire.
Bruxelles, Juin 2018
Aujourd’hui grâce à l’engagement de jeunes Afro-descendants, Lumumba sera honoré au sein de plusieurs villes belges. La volonté de la communauté Afro-descendantes de Belgique de rétablir la vérité et de ce fait recontextualiser l’histoire coloniale, a poussé plusieurs villes à revoir leur position sur la question. Un homme cristallise tous les honneurs.
Fin mai, la ville de Charleroi a rebaptisé une de ces rues en l’honneur de l’ancien premier ministre Congolais. La ville de Mons honorera ce même homme avec une plaque commémorative. A Bruxelles, durant la période de Pâques, la commune d’Ixelles a décidé de redonner vie à cet homme trop souvent laissé pour mort dans l’esprit collectif malgré son formidable combat pour l’indépendance de son peuple.
En ce 30 juin 2018, jour de l’indépendance congolaise mais aussi jour de ce fameux discours de 1960, une place est dédiée à l’illustre Patrice Lumumba. Une occasion pour les bruxellois de commémorer un homme qui a changé le cour de l’histoire. Une histoire belgo-congolaise falsifiée et négligée par nos manuels scolaires. Mais, si le chemin d’une Belgique qui assume ses erreurs passées est encore long, savourons néanmoins cette victoire que le peuple congolais et les Afro-descendants de manière plus générale attendaient. Victoire, qui signe le début d’une longue série.
Ne dites plus « Rdv à Pdenam ». Dites « Rdv square Lumumba »
DJ