Maghreb : Entre femme, leadership et société patriarcale

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La notion de leadership suscite depuis des siècles des réflexions diverses. Dans son ouvrage, « L’Éthique à Nicomaque », Aristote dévoilait déjà certains attributs précurseurs du leadership contemporain.

L’Université de Montréal le définit comme étant « l’art ou la capacité d’influencer les autres de façon qu’ils entreprennent des actions ou effectuent des tâches, avec motivation et sans contrainte, pour atteindre un but ou des objectifs communs. Que ce soit en sciences politiques, en relations industrielles ou en psychologie des organisations ».

Les idées préconçues quant au statut des femmes au Maghreb sont associées à de permanents états d’obéissance et de soumission. Les images de la femme asservie par sa religion, tout comme celle d’un mari omniprésent, voire omnipotent, sont bien trop présentes dans notre inconscient collectif et dans notre manière de percevoir ces pays. Ce qui fait que les termes leadership et femme maghrébine ont une connexion méconnue de beaucoup de monde. Pourtant nombreuses sont les femmes marocaines, algériennes et tunisiennes qui se sont émancipées d’un patriarcat bien présent dans ces sociétés. Plusieurs femmes ont percé les hautes sphères de pouvoir tant au niveau politique, social ou même artistique, faisant d’elles des modèles à suivre et des leaders.

Quelle est la place dans la société active de la femme maghrébine au Maroc, en Algérie et en Tunisie ?

Société marocaine et éducation

Pendant des années, la place d’une fille ne se trouvait pas à l’école. Sous couvert religieux et sous le joug des traditions, l’éducation des filles était très impopulaire. Cela les amenait celles-ci à endosser précocement le rôle de mère, d’aide-ménagère ou encore de cuisinière laissant l’éducation à leurs frères. En 1963, le roi Hassan II promulgue un texte qui dispose en son article 1er que l’école est obligatoire pour les garçons et pour les filles âgées de sept à treize ans. Ce texte de loi constitue une victoire pour les femmes, mais demeurera malgré tout très théorique. En effet, jusqu’à aujourd’hui, 25% des filles marocaines ne sont pas scolarisées et ne suivent aucune formation.

Cette société, régie exclusivement par les hommes et ancrée dans des traditions ancestrales, a subitement dû faire face à la modernité, à la mondialisation et à l’évolution économique mettant à mal l’épanouissement financier de la famille qui a toujours reposé sur l’unique salaire du père. Cette nouvelle réalité pousse donc les femmes hors des foyers, les obligeant à trouver du travail pour subvenir aux besoins de leur famille au même titre que les hommes. Son rôle prend de l’importance d’un point de vue sociétal et familial et fait trembler les fondements d’une société patriarcale bien enracinée.

Néanmoins, certains paradoxes laissent sous-entendre que la volonté d’une suprématie masculine perdure. En effet, les droits de succession au Maroc sont basés sur des textes coraniques qui permettent à un homme d’hériter deux fois plus qu’une femme. La femme se retrouve contrainte de partager son héritage avec des hommes, et ce, même lorsqu’elles n’ont pas de frères. Dans ce cas, il sera divisé avec un oncle ou un cousin lointain : c’est la règle du ta’sib. Cette société, sclérosée par des interprétations religieuses souvent rigoristes, sans proposer une protection renforcée vis-à-vis des femmes, entraîne l’accroissement du patrimoine des hommes au détriment de celui des femmes. Dans de nombreux cas, ces dernières se retrouvent dans des situations précaires majeures sans aucune aide proposée ; elles-mêmes doivent affronter les mêmes dépenses que les hommes tels que les impôts face auxquels tous, hommes et femmes se retrouvent égaux. Un tiraillement sans précédent se crée entre la volonté de maintenir des coutumes religieuses et une réalité sociale qui ne peuvent coexister correctement sans créer une oppression pour les femmes. Il serait intéressant de proposer des solutions en accord avec les nouvelles réalités de la vie et les mœurs religieuses qui font partie intégrantes de la société marocaine afin que celles-ci puissent s’allier sans créer de forts déséquilibres.

Des droits en pleine expansion

L’avènement de la reconnaissance des droits des femmes en Afrique du Nord a connu un essor rapide.

En Algérie, une loi de 2012 permet aux femmes un meilleur accès dans le domaine politique en ouvrant un quota prédéfini pour celles-ci sur les listes électorales.

De plus, la Tunisie dès son indépendance en 1956, avait déjà esquissé un projet d’émancipation de la femme dans la société. Ainsi, le pays n’accordera le droit de vote aux femmes que 12 ans seulement après la France. La Tunisie entreprendra des réformes majeures en ce qui concerne le droit des femmes. Les Tunisiennes peuvent dorénavant se marier à un homme d’une autre confession que musulmane. D’autres lois ont permis l’abolition de la disposition pénale qui permettait à un violeur d’échapper aux sanctions pénales s’il épousait sa victime.

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Marche à l’occasion de la Fête de la femme (13 août 2013)

Les grandes figures

Plusieurs femmes dans l’histoire de ces pays ont endossé le rôle de leaders.

Il est évident qu’il faut commencer par citer Kahina (photo d’article), la guerrière amazighe qui a combattu les Omeyyades lors de la conquête musulmane du Maghreb au 7e siècle. Fatima al-Fihriya, surnommée Oum al Banine qui est la fondatrice de la première université du monde « Al Quaraouiyine » située à Fès au 9e siècle.

Bchira Ben Mrad née en 1913, militante féministe tunisienne, est la fondatrice de l’Union Musulmane des Femmes de Tunisie qui est la première organisation féministe qui a ouvert aux femmes la possibilité d’avoir un rôle actif au sein du mouvement national.

À l’heure actuelle, de plus en plus de femmes se retrouvent en première ligne dans le domaine littéraire ou encore politique comme Houda-Imane Faraoun, ancienne ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication en Algérie. Sans oublier, Zainab Fasiki bédéiste et illustratrice marocaine qui a sorti sa BD « hshouma » qui traite des tabous sexuels dans la société marocaine.

Il faut également mentionner toutes ces femmes qui se battent dans l’anonymat dans divers domaines et qui sont le socle d’une émancipation progressive qui se construit tous les jours en Afrique du Nord.

La place des femmes au Maghreb reste entachée de traditions anciennes défiées aujourd’hui par la modernisation et les enjeux de la mondialisation. Le Maroc, l’Algérie et la Tunisie restent en effet dominés par une masculinité hégémonique qui se retrouve à jongler entre religion et émancipation féminine remettant en cause tout le fonctionnement ancestral de la communauté féminine.

L’accès des femmes à des postes parfois élémentaires laisse entrevoir un optimisme notable sur le sort de celles-ci malgré le long chemin qui reste à parcourir.

 

Najia Brahimia

 

 

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